Yves navarre : Ce sont amis que vent emporte



Ce sont amis que vent emporte.
Entre 1990 et 1993, Yves Navarre  part vivre au Québec, à Montréal. Son roman de 1991, Ce sont amis que vent emporte, se situe dans cette ville où un sculpteur, Roch, vit en couple avec un danseur, David. Le roman raconte leur lutte contre le sida. De retour en France, frappé de dépression, il se suicide aux barbituriques le 24 janvier 1994.Le titre fait référence à un vers de Rutebeuf, tiré du poème « Que sont mes amis devenus ? », qui déplorait le départ et la perte d'êtres chers. Le sujet du roman est la mort apportée par le sida.
Les personnages principaux sont deux artistes qui vivent en couple depuis vingt ans à Montréal. Roch, le narrateur, est sculpteur, et David est danseur. Ils sont tous deux atteints du sida, mais David est entré en phase terminale et se meurt.
Par-delà le thème de la maladie, Ce sont amis que vent emporte restitue une histoire d'amour. Durant sept jours, Roch va s'occuper de David et voir mourir celui qu'il aime, avant de se confier au médecin.

Mais l'essentiel de "Ce sont amis que vent emporte" n'est pas sociologique. Peut-on écrire de sang-froid le roman du sida intime, irrémédiablement associé, dépendant, soumis, altéré par le sida social ? Yves Navarre s'y refuse. Il publie un roman d'amour, effleuré par une méditation qu'il évacue difficilement :
« Nous ne serons jamais assez grands pour notre liberté (...) notre génération s'est perdue dans l'ambiguïté et le tapage. »
L'auteur rend magnifique le couple Roch-David. Il les fait entrer dans la légende de toutes les amours désespérées. On peut applaudir à ce désir de donner la version homosexuelle de Tristan et Iseult. On peut aussi se méfier… les homosexuels, doivent-ils montrer - à ceux-là mêmes qui ne n'en demandent pas tant - leur abnégation et leur courage ?

Ce roman grave souligne le plus tragique en quelques scènes brèves et extrêmement pudiques : Roch lave David, le couche, l'enlace, le nourrit, lui brosse les dents, une descente dans la mort... Il y a aussi les lettres de Rachel, la mère de David, parce que Roch (pour David ?) réclame très fort qu'elle authentifie leur amour.

"Ce sont amis que vent emporte" raconte la fin d'une vie, quand un garçon, jeune, atteint du sida, n'a plus que son ami, seul à pouvoir comprendre une mort qui en dit long sur une vie. Une histoire de tous les jours, quand on a la chance d'être deux. Plus profondément, Yves Navarre a écrit le roman de l'amour homosexuel. Il reste un doute : cet amour ne peut-il être reconnu que parce que le sida lui offre ses lettres de noblesse ?

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