Naissance d'un pont Maylis de Kerangal





"A l'aube du second jour, quand soudain les buildings de Coca montent, perpendiculaires à la surface du fleuve, c'est un autre homme qui sort des bois, c'est un homme hors de lui, c'est un meurtrier en puissance. Le soleil se lève, il ricoche contre les façades de verre et d'acier, irise les nappes d'hydrocarbures moirées arc-en-ciel qui auréolent les eaux, et les plaques de métal taillées en triangle qui festonnent le bordé de la pirogue, rutilant dans la lumière, dessinent une mâchoire ouverte." Ce livre part d'une ambition à la fois simple et folle : raconter la construction d'un pont suspendu quelque part dans une Californie imaginaire à partir des destins croisés d'une dizaine d'hommes et femmes, tous employés du gigantesque chantier. Un roman-fleuve, "à l'américaine", qui brasse des sensations et des rêves, des paysages et des machines, des plans de carrière et des classes sociales, des corps de métiers et des corps tout court.
Maylis de Kerangal nous fait vivre la construction d'un pont avec tous ses aléas. Le maire de Coca, fasciné par les constructions de Dubaï, veut édifier un pont majestueux pour désenclaver son centre-ville et relier les berges de la forêt où vivent les plus pauvres.
D'abord, on découvre l'ambition du projet, puis les acteurs principaux : le maire, l'architecte, le chef de projet, le grutier, la responsable du béton...
Le récit est quelquefois très technique et il est remarquable que l'auteur ait maîtrisé une telle connaissance des chantiers du bâtiment. Mais c'est aussi une histoire d'hommes car elle nous présente les personnages avec leurs origines, leur environnement familial et leurs spécificités.
Le pont se construit malgré tous les évènements inhérents à un tel projet : les oppositions des adeptes de l'environnement, les sabotages des entreprises lésées par la construction du pont, les mouvements sociaux, les problèmes de sécurité.
Le style littéraire est tantôt mélodieux, tantôt âpre et haché mais toujours avec une grande richesse de vocabulaire et une grande précision dans les descriptions.
C'est un texte d'une grande qualité sur un thème peu courant mais très bien documenté et qui permet de mettre en relation des personnages de tous horizons ce qui donnent des relations humaines riches et variées.
Beaucoup d'intelligence, de finesse, de force ...
Médicis 2010. Le personnage central de son roman « Naissance d’un pont » est un pont suspendu dans une ville imaginaire, Coca en Californie. Ce n’est pas le Golden Gate Bridge à San Francisco, ni le « mini-Golden-Gate » du Havre, sa ville d’adolescence, ni le Viaduc du Millau qui ont donné naissance à ce récit, mais un pont imaginaire. Un pont tracé dans le désert décidera du destin d’hommes et de femmes qui travaillent sur le gigantesque chantier. Maylis de Kerangal raconte une épopée humaine entre rêve littéraire et terreur d’une économie mondialisée.
...Mais, d’un autre côté, une irritation sourde m’a accompagnée pendant toute ma lecture. à part quelques anecdotes qui accrochent (l’histoire de Soren par exemple), le roman manque d’intrigue, on éprouve par moment de la lassitude, de l’ennui, il faut s’accrocher pour ne pas poser le livre. Il est décevant, par exemple, à mon goût, que le principal protagoniste, le chef du chantier Georges Diderot (en voilà un nom ironique pour quelqu’un qui n’a rien d’un philosophe !) ne tienne finalement que peu de place dans le récit, son aventure avec Katherine paraissant finalement dérisoire, alors que l’auteure en avait fait un portrait très riche dans le 1er chapitre, et qu’on attendait donc davantage. De même, je trouve que les problématiques des Indiens ou des conflits sociaux ne sont qu’à peine effleurées, c’est dommage, alors que plusieurs chapitres s’égarent dans du « hors sujet »

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