Didier Lestrade KINSLEY 6






Tout d'abord, il y a le titre qui, pour les non-initiés, réclame une petite explication de texte... Pourquoi Kinsey 6 ? Parce que, selon Alfred Kinsey, les différences sexuelles s'échelonnent de 1 (exclusivement hétérosexuel) à 6 (exclusivement homosexuel). Pourquoi Journal des années 80 ? Parce que ces années-là furent une période de liberté et de revendication pour la cause homosexuelle. Et pourquoi Didier Lestrade ? Parce il est "exclusivement homosexuel", qu'il a contribué au mouvement underground à Paris en créant deux revues gays, qu'il a "passé pas mal d'années à baiser". Et parce qu'il est devenu un des principaux leaders de la lutte anti-sida : le créateur de l'association Act-Up, connue pour ses coups de gueule, ses coups de poing, ses prises de position radicales, c'est lui.Kinsey 6estévidemment plus qu'un journal intime sur les années 80. Il est le symbole d'une époque, d'une génération, d'une certaine idée de la vie. Ce tourbillon de sexe, de fêtes, de paillettes et aussi de drogues rappelle que tout semblait possible à cette époque : on faisait l'amour sans préservatif, on riait, on s'étourdissait, on croisait Warhol, Prince ou Aragon. Mais cette période de liberté fut rattrapée par une mort appelée sida.Si leJournal de Lestrade, qui débute en janvier 1981 pour s'achever en 1986, passionnera les curieux ou les nostalgiques, ce sont aussi la préface et la postface qui s'imposeront au lecteur. Dans la préface, Lestrade nous raconte son enfance en Algérie, ses trois frères... et sa mère qui quitta le foyer pour l'amour d'un autre. À l'image de sa mère, Lestrade déclara quelques années plus tard : "Tout ce que j'ai fait dans ma vie, c'est par amour des hommes." Sa préférence sexuelle, sa culture (punk puis disco), ses amis, tout nous plonge dans son univers intime, fort, radical et attachant. On comprend mieux le Journalqui suit et la lutte festive pour exister tel qu'on est. La postface, elle, date de 2001, soit quinze ans après la fin du Journal.


1981.Didier Lestrade a 23 ans. Il commence un journal intime qu'il tiendra jusqu'en 1986. Commencé alors que le sida vient d'apparaître en Californie, ce journal se termine au moment où l'épidémie arrive à Paris. Ce sont les années du Palace, du 7, du Trap et de la rue Sainte-Anne. Les années Erasure, Bronski Beat ou Defunkt. Les années d'une certaine insouciance pour les homosexuels mais les débuts d'une lutte pour leur affirmation.Didier Lestrade est alors au cœur de ce milieu. Magazine, la revue qu'il anime, donne la parole aux acteurs de la scène homosexuelle underground de l'époque. " Mag partait d'un constat politique où le misérabilisme n'avait pas la moindre place, il n'y avait jamais d'espace consacré à la dureté de la vie homosexuelle, la réalité sociale. Nous vivions dans un monde imaginaire où tout le monde était brillant, bien foutu, avec des bites énormes.Nous prenions à la lettre les dessins de Tom of Finland. " Ce livre est la chronique de ces rencontres, de ces expériences, de cette vie dans le Paris du début des années 80. Une vie qui fut celle de beaucoup. Une vie tranchée par le sida.
Souvent pertinent et intéressant

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