Anfrew Holleran: le danseur de Manhattan


New York, fin des années 70. A vingt-neuf ans, Malone, jeune homme de bonne famille et avocat, découvre son homosexualité, qu'il vit comme un " cancer " jusqu'à ce qu'il rencontre Frankie, un jeune ouvrier. Mais le poids des habitudes transforme rapidement leur vie commune fusionnelle en prison dorée pour Malone, qui s'enfuit un soir où Frankie découvre ses nombreuses infidélités. Après avoir erré dans Manhattan, Malone est recueilli par Sutherland, une folle flamboyante qui l'introduit dans les fêtes les plus excessives. Malone, en quête d'amour, passe les neuf années suivantes à danser dans les bras de tous les garçons de New York, goûte à toutes les drogues, s'initie à toutes les pratiques sexuelles. Des boîtes de nuit de Manhattan aux orgies extravagantes de Fire Island commence alors une lente déchéance dont l'issue ne peut être que la rédemption ou la mort...
Biographie[modifier | modifier le code]
Andrew Holleran est un pseudonyme. Son premier roman, Le Danseur de Manhattan, parut en 1978. Il se déroule dans les discothèques de New York et à Fire Island, et présente plusieurs points communs (lieux, thèmes) avec le caustique roman satiriqueFaggots de Larry Kramer, publié la même année. Le roman de Holleran est cependant plus littéraire et onirique que celui de Kramer.
Son roman suivant, Les Nuits d'Aruba, raconte aussi la vie d'un homosexuel. Son dernier roman, Grief, a reçu le Stonewall Book Award en 2007. Il sera publié, en français, aux éditions [MiC_MaC] sous le titre Le Passant chagrin en mai 2008.
Holleran enseigne l'écriture à l'American University de Washington, et publie des nouvelles dans des anthologies comme and M2M : New Literary Fiction, et des articles dans The Gay and Lesbian Review.


Voilà un livre apparemment culte d’Andrew Holleran sur la vie gay new-yorkaise dans les années 70 et juste avant le Sida. En effet, j’ai perçu tout ce que ce bouquin pouvait représenter pour la génération qui avait vécu cette époque. J’y vois surtout à la fois les réminiscences de cette « culture » sur celle d’aujourd’hui, et aussi un peu la manière dont elle est revenue (avec tous les dangers que cela représente) tout en s’adaptant à son temps et une plus grande intégration de l’homosexualité dans la société.

Drogue et clubbing

Il s’agit donc d’un roman qui raconte une histoire et des événements que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître. L’auteur utilise le récit de la vie d’une de ces icônes du milieu gay, Malone, un très beau mec qui sera pendant des années la coqueluche du ghetto new-yorkais. Une de ses connaissances est le narrateur, et il raconte comment Malone commence à s’assumer, ses premières rencontres fugaces dans les parcs, et la manière dont une des grandes figures du milieu gay, Sutherland, une folle hurlante et extravagante, le prend sous son aile. Pour le meilleur et aussi pour le pire, Malone trouve un refuge dans ce miroir aux alouettes où le clubbing (avant que cela s’appelle comme ça) est le seul salut, où les drogues sont l’usage, et où on se prostitue ou bien l’on vit aux crochets de quelques héritiers gays planqués (ce qui est à peu près la même chose).

Culture gay

On y retrouve donc des éléments de « culture » gay bien actuels. Les clubs, les drogues, la mode, le culte du corps, la promiscuité sexuelle des sex-clubs, etc. Mais on y repère aussi toute la liberté, l’insouciance et la déraison d’une époque sans Sida, juste au début d’une meilleure acceptation des homos (au moins dans le milieu gay), et d’une visibilité toute balbutiante. Une opacité et un anonymat des gays qui leur permettent d’encore plus se désinhiber. Cette vie toute passionnelle accuse naturellement des descentes aussi vertigineuses que les fêtes battent leur plein. Cette existence toute en strass et en paillettes cache aussi une solitude inextricable, et des relations amoureuses qui ne fonctionnent pas, une sorte de pis-aller où l’instinct grégaire et la reconnaissance de ses pairs pallient à un manque d’affection manifeste.

Remarquablement bien écrit

Une qualité notable de ce roman, et qui n’est pas si courant dans cette littérature, est qu’il est remarquablement écrit. Cela fait du bien de lire un auteur avec tant de style et de panache. Il décrit évidemment des faits très « gays » et parfois très cul, mais a une vraie plume pour évoquer New York et les états d’âme de ses personnages. Cette acuité et forme très alerte et agréable renforcent l’attachement aux personnages. Tandis que la tension dramatique se densifie à mesure que le récit progresse, que Malone s’intègre et expérimente, on voit que les personnages prennent de l’âge. Et on retrouve là encore un des leitmotivs gays : vieillir fait peur, prendre de l’âge est une mort sociale, ce qui représente une mort tout court (puisque l’on ne vit que dans la représentation et dans le show-off).

Gai et triste                                                     


Le roman est donc gai et triste à la fois. Et cette tristesse est une langueur assez terrible qui s’exprime sur toute la fin. Il semble que la fête soit finie, et qu’une nouvelle génération d’homos vienne déjà prendre le relais. Une nouvelle génération qui sera dévastée par une maladie que l’on ne connaît que trop bien, et dont les répercutions changeront aussi le « paradigme pédé ».

Je n’ai pas été totalement emballé par le bouquin, mais je lui trouve le mérite de raconter avec une sincérité très touchante cette période et ces gens. En tout cas, à pas mal d’égards, je ne regrette pas trop cette ère si singulière, malgré ses aspects les plus affriolants et attirants.


Le danseur de Manhattan, Andrew Holleran


Malone est jeune, beau, américain et avocat. La révélation de son homosexualité le fait brusquement changer de monde et passer de l'austérité puritaine de Wall Street aux bas-fonds clinquants de Manhattan.
En compagnie de Sutherland, une star de haute volée qui lui sert de mentor, il parcourt une trajectoire fulgurante. Sutherland, folle scintillante et superbe, court de bosquets accueillants en fêtes délirantes, cultive l'aphorisme, se défonce avec délectation et lit Ortega y Gasset.
Malone, adulé et désiré, suit un itinéraire suicidaire et fascinant, fait à la fois d'hédonisme et d'insatisfaction, où la vie est conçue comme un spectacle auquel il convient de donner le plus de faste possible : recherche perpétuelle de l'excentrique, du choquant, de l'exagéré, du démesuré, esthétisme pur, transcendance du sordide en sublime, ivresse au-delà du baroque dont ni Malone ni Sutherland ne sont dupes.
« Que dire sur le succès ? Rien, mais les ratés, cette infime sous-espèce d'homosexuels, la folle perdue qui embraye et lance sa voiture par-dessus la falaise : voilà qui me fascine, les tantes qui se méprisent parce qu'elles en sont, et qui sombrent dans le vil et le sordide ».



L'un comme l'autre ont d'innombrables amants, vivent une sorte de surréalité enivrante ; mais le véritable héros de ce livre n'est-il pas aussi la ville de New-York dont la sourde pulsation, protéiforme et vénéneuse, en rythme chaque page...
Monde dérisoire que celui d'Andrew Holleran, qui sait de quoi il parle, avec une certaine distance et un regard ironique. Monde en quête d'absolu, malade à mourir de cette recherche mais qui s'habille chez Gucci ou dans la 5ème Avenue, qui passe ses journées dans les saunas ou en folles fêtes. Monde malade de cette recherche et qui ne sait trouver que les artifices du sexe.
Un roman drôle par le regard de dérision aimable, tendre par la fragilité des personnages et émouvant par ces rêves inaccessibles.

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