Jussi Adler Olsen : Délivrance


Après Miséricorde et Profanation, Jussi Adler-Olsen nous livre avec Délivrance une enquête bien angoissante comme on les aime. On retrouve ainsi l'étrange trio du Département V à qui on confie systématiquement les affaires dont personne ne veut se charger.
Dès la lecture du prologue, on se doute qu'on ne va pas lâcher ce livre ! Deux frères adolescents sont séquestrés, attachés et bâillonnés depuis trois jours dans un hangar isolé du reste du monde. Avant d'être tué, un des frères réussi à écrire une lettre SOS avec son sang, qu'il glisse dans une bouteille qui tombe à l'eau… Dix ans après, elle apparaît sur le bureau de Carl Morck, l'inspecteur du département V en charge des affaires non résolues, qui croit à une plaisanterie. Malheureusement pour lui et son fidèle collaborateur Assad, cette lettre est un réel appel au secours. L'équipe va aller de surprise en surprise : la disparition de ces adolescents n'a, d'une part, jamais été déclarée par la famille qui appartient aux Témoins de Jéhovah, et deux enfants d'une autre communauté religieuse viennent d'être enlevés… Tout laisse à croire que le tueur est toujours en activité.
Adler-Olsen aime nous détourner de l'enquête au fil des chapitres, en nous racontant ces petites choses de la vie quotidienne des inspecteurs mais également en nous parlant du mode de vie des sectes religieuses et de l'éducation de leurs enfants. Ce qui bien sûr sera crucial pour comprendre le cheminement du tueur. Depuis Miséricorde, l'équipe d'enquêteurs est, du fait de nombreux non-dits, en conflit quasi permanent . Les trois personnages principaux, prennent de l'ampleur à chaque roman, devenant de plus en plus complexes et mystérieux pour notre plus grand plaisir. Nous ne sommes pas au bout de nos surprises ! D'où vient Assad ? Et Rose, la secrétaire, quel jeu joue-t-elle ? Comme dans les précédents de la série, Délivrance se distingue par un ton enlevé qui alterne la comédie et l'horreur. L'humour affleure grâce à la personnalité du commissaire Mørck: bougonne, revêche et tire-au-flanc. La relation malicieuse qu'il entretient avec Assad offre des tranches de marrade bienvenues. Car la terreur insufflée par les actions du kidnappeur calculateur est glaçante. Au final, un très bon polar, bien découpé avec ses multiples rebondissements, qui se dévore d'une traite. On en redemande…




Comme dans "Miséricorde", l'auteur nous présente deux prises de vue différentes qui s'alternent au gré des chapitres; ici, celle de l'enquête et celle qui nous fait suivre un prédateur. Cela nous permet d'avancer dans l'enquête de police en cours et en même temps de nous mettre dans la peau de celui qui tente justement de ne laisser aucune trace et de larguer les enquêteurs.


L'ambiance au sein de la brigade criminelle est franchement succulente; j'irais même jusqu'à prétendre que cela me fait penser parfois à du Camilleri à la sauce hollandaise... euh pardon, danoise. C'est plein de finesse dans les interactions, les dialogues - de sourd parfois! - sortent vraiment du même moule que l'écrivain sicilien. Le téléphoniste chez Camilleri me fait assez penser à Hassan, ici dans les bureaux de la criminelle de Copenhague. Etant un grand adepte de l'ambiance sicilienne de Camilleri, je ne peux qu'apprécier celle-ci, similaire, quoiqu'un peu moins méditerranéenne!

A contrario, l'ambiance entre cet homme prédateur et son épouse soumise est absolument oppressante et dérangeante. L'auteur est arrivé à tendre entre ces deux personnages un câble qui est prêt à rompre à chaque secondes qui passe. On retient alors son souffle et on attend que cela passe. C'est assez violent, c'est le moins que je puisse dire.

L'auteur nous démontre de quelles manières un être humain peut virer à la noirceur, à la folie totale. Nous pouvons en suivre le processus depuis l'enfance, une enfance qui s'est déroulée un sein d'une famille intégriste, dirigée par un père violent, ne jurant que par Dieu. Un homme respecté par la communauté mais pas tant respectable avec sa femme, ses enfants, qui en subissent les débordements.

Soit, Jussi Adler-Olsen nous démontre à quel point une secte peut mettre à mal une famille.

"Quand tu parles, on dirait qu'on égorge un cochon, lui dit son père, alors qu'ils passaient à table dans la cuisine. D'ailleurs, c'est à cela que tu ressembles. A un porc. Regarde-toi dans la glace. Regarde comme tes traits sont laids et grossiers. Colle ton horrible groin sous tes aisselles et sens comme tu pues. Va te laver, créature répugnante." Page 279

Plusieurs pièces se mettent en place petit à petit et d'une manière intéressante. L'auteur nous présente plusieurs scènes qui, au bout d'un moment, se joignent les unes aux autres pour n'en former plus qu'une; et celle-ci n'est pas forcément réjouissante.

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