Neal Stephenson, : Zodiac






Je cherchais un roman sur l'écologie, après avoir lu « le parfum d'Adam » de Rufin et je suis tombé sur « Zodiac » de Stephenson . J'ai beaucoup aimé ce livre, ses dénonciations sur la pollution des fleuves qui ont l'air si réelles (le sont-elles ? Ce serait étonnant que ce ne soit que de la fiction) … que je ne suis pas près de fréquenter Boston Plage cet été ! (Mais est-ce que Paris Plage, c'est vraiment mieux ?). L'action est très dynamique ; on ne s'ennuie pas un instant. Je le conseille vivement.

Boston est le théâtre d'une affaire pour le moins nauséabonde de crustacés empoisonnés, impliquant pêle-mêle la mafia

locale, des adeptes de heavy-métal et tout un tas de produits polluants peu recommandables, psychotropes ou non.

Heureusement, SAngamon Taylor, chuimiste de génie au look grunge, écologiste engagé, pensez, il utilise un ordinateur dont les émanations sont un million de fois moins nocives que celles d'un appartements repeint de frais, est sur le coup. C'est à bord de son zodiac et armé d'un chromatographe à cinq mille dollars qu'il lutte contre la délinquance pétrochimique.

Laissez-vous entraîner par l'auteur du monumentale cryptonomixon dans un thriller écologique rien moins que jubilatoire.

Il y décrit la lutte d'un militant écologiste, Sangamon Taylor, en conflit avec un groupe industriel responsable d'une pollution de la baie de Boston. Le personnage principal est directement inspiré des archétypes du roman noir en particulier de l'œuvre de l'écrivain James Crumley2.


Souvent associé au mouvement cyberpunk suite à la publication du très remarqué "Samourai virtuel", Neal STEPHENSON est pourtant l’auteur d’une oeuvre variée et largement protéiforme. De "L’âge de diamant" [indispensable] au "Cryptonomicon" en passant par le toujours non traduit dans nos contrées "Baroque cycle", ses romans abordent des sujets complexes et ambitieux, parfois à la limite de la SF comme c’est ici le cas avec "Zodiac".


Sangamon Taylor, petit génie de la chimie au look de grunge défoncé, est connu dans tout Boston pour être le principal fouteur de merde de la ville. Sa principale cible : les pollueurs qui déversent leurs petits cocktails de déchets hautement toxiques dans le port. Attention, pas des boites de coca et autres détritus issus d’une consommation immodérée de produits manufacturés, mais de véritables saloperies dont les émanations suffiraient à tuer instantanément un taureau de cinq cents kilos. Métaux lourds, dioxines et autres produits chimiques directement vomis par les conduites illégales qui relient les usines pétrochimiques du complexe industriel au port de Boston.

Activiste de renom et cheville ouvrière du GIE [Groupe d’Intervention Environnementaliste], Sangamon se considère comme un écolo-spiderman, ne sort jamais sans son chromatographe à 5000 $ et se déplace exclusivement en vélo et en Zodiac. Autant dire que le gars est tout simplement la terreur des conseils d’administration des entreprises qui ont le privilège de figurer dans le collimateur du GIE. Cette petite guérilla entre pollueurs et défenseurs de l’environnement pourrait durer éternellement si cette fois les industriels de la chimie n’avaient dépassé la ligne rouge.

Suite à l’analyse du foie de homards péchés dans la baie de Boston, Sangamon découvre une pollution massive aux biphényles polychlorés [PCB], une substance chimique dérivée du chlore et appartenant à la grande famille des dioxines [pour information, cette substance entre dans la composition du DDT et de l’agent orange].

Les PCB sont très peu solubles dans l’eau et peu biodégradables, en revanche ils aiment beaucoup les graisses, dans lesquelles ils sont au contraire très solubles. En s’accumulant dans l’organisme humain ils provoquent, à court terme des maladies de peau et des dérèglements hormonaux, à long terme des cancers.

Persuadé d’avoir découvert l’affaire de l’année, Sangamon s’apprête à lancer les opérations médiatiques, sauf que quelques jours plus tard, une analyse d’échantillons d’eau infirme les données initiales. La pollution aux PCB semble avoir disparu comme par enchantement. Sangamon a-t-il rêvé, les industriels ont-ils trouvé une substance miracle qui leur permettrait d’effacer toute trace de leurs méfaits ?

Qualifié de « Thriller écologique », "Zodiac" ne participe que de manière marginale à la science-fiction, au mieux on rapprochera ce roman de l’excellentissime "Troupeau aveugle" de John BRUNNER. Mais si la démarche et les préoccupations des deux auteurs sont assez proches, en revanche le traitement et le style sont tout simplement à l’opposé.

A ceux qui s’interrogent sur le titre assez amusant de ce roman, sachez qu’il s’agit tout simplement d’un clin d’oeil à Greenpeace, l’organisation étant une grande consommatrice, pour ses opérations commando, de ces embarcations pneumatiques puissantes, maniables et surtout économiques. Sangamon Taylor nous gratifie d’ailleurs au début du roman d’un magnifique laïus à la gloire du Zodiac.

Les propos extrêmement ironiques de Neal STEPHENSON sont absolument jubilatoires, évidemment on rit jaune et le sourire est crispé, mais l’implacable lucidité de l’auteur a quelque chose de rafraîchissant. Pas de faux-semblant, pas de discours naïf et abêtissant sur l’écologie, les petites fleurs et les gentils animaux en danger, mais un regard implacable sur la réalité du monde, la bêtise humaine et l’avidité des industriels. STEPHENSON distribue les mauvais points, mais à travers cette leçon ce ne sont pas seulement les pollueurs qui sont dénoncés, mais tout un système médiatique qui gravite autour des questions environnementales.

EXTRAIT : "La plus grande contre-vérité en matière de capitalisme américain, c’est de dire que les sociétés ne songent qu’à défendre leurs intérêts. En fait, elles font tout pour se saborder. La plupart de leurs bourdes se rapportent à des produits dont n’importe quel chimiste connaît la toxicité. Elles les balancent dans la nature sans même penser à se cacher. La preuve est là, au vu de tous, comme si elles envoyaient des avions larguer des liasses de confessions signées. Tôt ou tard, quelqu’un arrive en Zodiac pour les montrer du doigt et ce qui en résulte est bien plus dévastateur que tout ce qu’un terroriste, un Boone, pourrait réaliser avec ses bombes et ses fusil d’assaut. Tous les vieillards cancéreux vivant à trente kilomètres à la ronde se métamorphosent soudain en ennemis implacables. Ce qui est également le cas de leurs épouses et des mères d’enfants malades et même bien portants. Les politiciens et les médias se bousculent tant ils sont impatients de participer à la mise à mort. Ce revirement d’opinion a lieu du jour au lendemain et le provoquer est facile. Il suffit de se pointer et de tendre l’index."

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