Maurice Sachs : le sabbat. 1938.

l'un des grands livres maudits de la littérature française par celui qui fut un ami de Picasso, de Cocteau , de Gide, Max Jacob, Coco Channel... « Le sabbat » est une confession qui dépasse la simple biographie de son auteur, le juif alsacien Maurice Sachs et se situe dans le genre de l'autobiographie romancée. Ce sont les mémoires d'un aventurier dans lesquelles le lecteur assistera au début de la fin d'une Europe qui commençait à saigner à mort et avec elle ses élites intellectuelles et artistiques. Maurice Sachs n'est rien d'autre que le plus grand représentant de cette débâcle : Juif, homosexuel, faux, filou et le plus épineux, aussi informateur. Le déclenchement de la Seconde Guerre mondiale empêcha la publication de "Le sabbat", qui vit finalement le jour en 1946, alors que Sachs était déjà décédé. Le succès fut immédiat, en même temps il suscita une polémique sans fin... Maurice Sachs est la dissidence sauvage transformée en littérature : un Juif collaborationniste, un homosexuel homophobe et un escroc pharisaïque. Contrairement aux "collabo utopistes », gens de prétendue bonne foi qui voyaient en Hitler l'incarnation d'un Nouvel Ordre Mondial au sein duquel la France pourrait retrouver la grandeur d'antan, il s'inscrit dans un collaborationniste « pratique » soutenu par ceux qui voyaient dans l'occupation l'opportunité de prospérer , pour acquérir une bonne situation personnelle et, accessoirement, rembourser les dettes contractées depuis l'époque de la Troisième République. Aucune des deux n'est excusable. La deuxième, celle de "Sachs" me semble encore pire. Autoproclamé coupable de toutes les perversions, le Parisien assume sa responsabilité presque avec indifférence, et au lieu d'écrire quelques aveux dans le plus pur style chrétien du terme, il rédige une sorte d'acte d'accusation sous la forme littéraire d'un faux aveu : le résultat se concrétise dans deux livres, Le Sabbat ( Le Sabbat. Souvenirs d'une jeunesse orageuse , écrit en 1939 et publié à titre posthume en 1946, un an après sa mort par exécution), et La Chasse ( La Chasse à courre ). Le fait est que le sentiment précoce d'être différent - pauvre parmi les riches, Juif parmi les gentils - provoque chez Sachs, au lieu d'une recherche d'approbation de ses collègues, un rejet exacerbé de la majorité et une volonté ferme d'exagérer cette différence par une différenciation réactive qui soit une réponse pour la confirmer. Confronté au monde par des faits dont il n'est pas directement responsable, il accepte le défi et se bat pour accentuer sa défaite, se vautrant dans le bourbier de l'échec et espérant atteindre la libération par l'autopunition un peu comme les martyrs chrétiens, "ces masochistes que les châtiment porté à son maximum et, par conséquent, ne renonceraient jamais à leur foi, puisque la mortification était devenue leur nourriture spirituelle." Le contrepoids pour équilibrer la balance, il le trouve dans la découverte de l'art, cette activité uniquement humaine qui élève le bipède en érection au sommet du règne animal, cette création inutile d'un point de vue évolutif mais fondamentale au développement de l'homo sapiens et qui est "la seule tentative réussie de contact entre l'humanité et la nature, la seule transcendance possible non conditionnée par la morale ou éthiquement répréhensible, le seul signe de pleine liberté de l'être humain." Comment concilier les deux tendances, l'autodestructrice et l'artistique, c'est à cela que Sachs a consacré sa vie et qu'il raconte dans cette première partie de ses mémoires. A dix-huit ans, Sachs rencontre l'homme qui aura la plus grande influence sur sa vie, Jean Cocteau , et est immédiatement séduit par son mélange de localisme et de cosmopolitisme : «Je serai toujours redevable à Jean Cocteau, car il fut le premier à me faire éprouver cette profonde volupté de l'âme où se mêlent amitié, sens religieux, dévotion à la beauté et vénération de la grandeur, qui sont une sorte d'amour qui peut ne s'épanouir en nous qu'à un certain âge, mais à cet âge-là elle est plus nécessaire que l'eau et le pain, une ferveur sans laquelle la jeunesse ne vaut pas la peine d'être vécue»; Cocteau est au zénith de sa gloire et Maurice est en âge de ne pas y résister. . Il est vrai que plus tard il a bien perçu la part d'ombre de Cocteau,, mais l'effet était déjà produit et d'ailleurs cette empreinte été depuis longtemps estampée. C'est aussi par la médiation de Cocteau, dont l'influence sur la jeunesse qui l'entoure fut incommensurable, que Sachs rencontre le Dieu chrétien. Fanatique presque inné, il a vécu une époque de ferveur religieuse, bien que peu croyante, éblouie par l'idée d'un être tout-puissant, par l'image du Christ et, surtout, par l'hagiographie chrétienne et l'histoire sacrée : la partie mythique du christianisme le conquiert car il trouve en elle la confirmation d'une partie de ses idées sur l'impureté et la rédemption. Mais aussi le sentiment d'appartenir à un groupe - bimillénaire ! - dans lequel dissoudre la responsabilité de ses actes et e ses idées individuellement discutables. Il intégra le séminaire (par vocation ou pour fuir ses nombreux créanciers?) mais finira par en être expulsé (surpris en plein acte sexuel avec un autre séminariste) et avec la ferme conviction de ne jamais revenir à la discipline chrétienne. Il s'essaya sans plus de succès à l'armée. Dans ces organisations grégaires et masculines il apprécie d'être libéré de la responsabilité dans la prise de décision (qui incombe aux supérieurs) et de n'avoir autre tâche que celle d'obéir, mais en définitive, ce qui l'attire le plus c'est la possibilité d'y trouver des partenaires sexuels (C'est parce qu'il sera surpris en pleine activité sexuelle qu'on l'expulsera du séminaire...) , ainsi que la possibilité de ne pas être d'accord et de désobéir. Dans ce livre Sachs parle beaucoup des trois hommes qui contèrent le plus pour lui. : Jean Cocteau, Max Jacob et André Gide pour lesquels y eut de l'admiration mais auprès desquels il recherchait surtout l' approbation car ils s'agissait de personnalités publiques notoires - auxquelles, à coup sûr, il aspirait à ressembler et avec lesquelles il partageait des prétentions plus personnelles que littéraires, une miroir dans lequel il aurait aimé se voir reflété. Après avoir essayé de se rapprocher de ces hommes de lettres notables, il tentera la notoriété sociale en fréquentant le Faubourg Saint-Germain ( la plus grande concentration de beaux, riches et célèbres dans tout Paris).Mais ce sera encore un échec. Il abandonne donc la tentative, mais avec la nette volonté de réussir socialement par lui-même afin de pouvoir se venger plus tard d'une position qu'il aura atteinte sans avoir à renoncer à sa vanité. Et pour satisfaire cette aspiration, toute voie, détour ou raccourci est valable : vol, escroquerie, tromperie et abus légitimé au nom d'un bien supérieur. Cette recherche le mènera en Amérique où il gère une exposition et donne une tournée de conférences sur des sujets sur lesquels sa compétence est plus que discutable - mais que les Nord-Américains surestiment parce qu'il vient de vieille Europe Après une malheureuse et trompeuse aventure matrimoniale mal planifiée et mal concrétisée il retourne à paris avec un amant américain ou ils vivent dans une très grande précarité. André Gide qui l'aime bien lui offre du travail à la Nouvelle Revue Française. Mais Sachs peu bâti pour la stabilité s'enfonce dans la paresse, les dépenses constantes, et la rechute dans l'alcoolisme. C'est de la grande littérature mais il faut avoir un estomac qui digère bien. #henrimesquida #cinemaetlitteraturegay

Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

Lonsam Studio photo gay japon

Bret Easton Ellis : Les éclats 2023.

Jean Desbordes