Un garçon parfait Alain Claude Sulzer






Efficace autant que discret, attentif et mesuré, empathique mais retenu, le « garçon parfait » est toujours prévenant avec les voyageurs, sait d'expérience entamer une conversation mais aussi y mettre fin, développant « un juste instinct des désirs du client ». Ernest en est l'exemple : une ombre furtive et une présence rassurante. Il travaille dans un palace suisse, à Giessbach, où descend la bonne société internationale d'avant-guerre. Dans son métier comme chez lui, rien ne semble en désordre. Cette ligne de vie est juste écornée, parfois, le temps d'une étreinte derrière un buisson. L'arrivée de Jacob, apprenti serveur, va bouleverser la vie d'Ernest. Jacob est lui aussi un « garçon parfait ». Ernest va le former, vivre avec lui une liaison passionnelle. Mais un jour Jacob le quitte, part aux Etats-Unis... Trente ans plus tard, en 1966, Ernest reçoit un courrier de Jacob qui rouvre la plaie : la soumission au désir, la violence et la mélancolie.

Un garçon parfait est le premier roman traduit en français d'Alain Claude Sulzer. Traducteur de Julien Green et de Jean Echenoz, il vit entre Bâle et l'Alsace, entre deux cultures et deux langues. Il vient d'obtenir le prix Médicis étranger pour cette belle fiction qui mêle réalité historique et passion intime. Le romancier sait décrire, sans appuyer, la montée du nazisme en 1936, l'homophobie des années 60 en Allemagne, les relations – sociales et sexuelles – de maître à esclave. Thomas Mann n'est pas loin, comme une ombre tutélaire. Sulzer choisit un décor esthétisant mais neutre, en installant ses personnages dans un lieu de villégiature qui ressemble à celui d'une opérette. Mais dans ces décors enchanteurs se cachent des désirs, des chagrins et des trahisons misérables. Peu à peu, l'élégance et le plaisir s'effacent. Et l
grand hôtel Giesbach


À cet instant important du récit, Ernest a 20 ans, il travaille dans un palace suisse, pour ce garçon tout s'écoule tranquillement depuis qu'il s'est enfui à 16 ans de chez lui... sa vie est réglée comme une horloge (suisse)!
Jusqu'à ce jour de 1935 où il tombe amoureux du beau Jacob, un garçon de 19 ans, et nouvel employé de l'hôtel, qu'Ernest va former.

Ernest et Jacob se tendent la main, Jacob semble n'être venu que pour Ernest ! Dans cette poignée de main, qui symbolise et fixe l'amour du premier instant. Ernest est pris d'un sentiment d'abandon total pour son monde, ce monde organisé autour de sa petite personne, qu'il a créé pour son propre confort... va s'effriter rapidement pour laisser place à un amour passionnel et sans borne avec Jacob !

Alors qu'ils vivent un amour intense dans la même chambre du Palace où il travaille. Jacob, insouciant et avide d'argent, va petit à petit se laisser séduire par des hommes riches, jusqu'au jour où il se prostituera pour l'homme célèbre(Thomas Mann ?)ce qui mettra fin à l'amour des deux jeunes amoureux.
Ernest, en souffrira durant 30 ans, durant toutes ces années il ne cessera d'aimer Jacob, avec le regret de ne pas lui avoir pardonné et de l'avoir laissé partir...

A. C. Sulzer manipule les mots et le temps avec délicatesse et dureté (une main de fer dans un gant de velours), sans jamais se perdre au fil de cette histoire cruelle et douloureuse.
Ce beau roman est émouvant, par moment même poignant, rempli de souffrance qu'on ne voudrait pas vivre un seul instant, heureusement qu'il y a eu cet amour, aussi court qu'il fût !

Ce roman est beau bien que je trouve l'écriture très classique un peu froide.

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