Marcel Proust : contre Sainte Beuve.



A la fin de l'automne 1908, Proust rentre de Cabourg épuisé. Depuis longtemps, il a renoncé à son ?uvre. Profitant d'un répit que lui laisse sa maladie, il commence un article pour Le Figaro : « Contre Sainte-Beuve ». Six mois plus tard, l'article est devenu un essai de trois cents pages. Conversant librement avec sa mère, l'auteur entrelace, autour d'une réflexion sur Sainte-Beuve les souvenirs personnels, les portraits d'amis, les impressions de lecture. Voici le château de Guermantes : voici M. de Quercy et Mme de Cardaillac, grands lecteurs de Balzac, mais qui ressemblent à s'y méprendre à Charlus et à Gilberte. Sans le savoir, Proust venait de libérer son génie.Proust ne voulait pas qu'on mît des idées dans un roman. Toutes les analyses qu'il a écartées d'ÿ la recherche du temps perdu, on les trouvera ici. Elles confirment que Proust, le plus grand romancier de son siècle, pourrait en être aussi le plus grand critique.
Sous ce titre a été rassemblé un ensemble hétéroclite de papiers dont l'un d'eux concerne bel et bien directement et explicitement Sainte-Beuve,(un recueil de critiques littéraires publié à titre posthume en 1954, et rassemblant les pages que l'écrivain a consacrées, sans leur donner d'ordre, aux auteurs qu'il admirait.) mais, même dans ce chapitre, il s'agit moins d'une critique de Sainte-Beuve que d'une volonté de se positionner et d'exister en affirmant l'impulsion purement subjective qui hantera toujours l'auteur d'À la recherche du temps perdu.

Aussi, la critique attendue (car laissée à entendre par le titre) n'impose rien objectivement au lecteur, mais révèle plutôt quelques traits encore mal définis d'une conviction intérieure immédiate.
D'autre part, on retrouve plusieurs passages qui vont être repris dans À la recherche du temps perdu et qu'il me
semble qu'il vaut mieux aller lire là-bas, à moins d'être un expert de Proust ou d'aimer l'érudition pour elle-même.
On y trouve par exemple une critique de la critique de Sainte Beuve sur Balzac,intéressante,ou des analyses comparés de vers de Baudelaire avec d'autres poètes qui nécessitent une grande érudition dans le domaine de la poésie que je n'est pas du tout. pas mal de pages donc que je n'est pas comprises. Alors que la recherche en entier ne me pose pas de problèmes. On y lit le point de vue de Proust sur Nerval, Baudelaire, Balzac et Flaubert. On n'y lit pas de critique contre Sainte-Beuve donc...
Bon, faut le dire, Contre Sainte-Beuve, c'est un peu de la branlette intellectuelle. Mais une branlette très pertinente pour qui s'intéresse un minimum à la littérature (ou si, comme moi, on vous a obligé à le lire en fac de lettres). Un essai sous fond de guéguerre théorique sur la façon d'aborder, de lire et de comprendre un auteur.
D'un côté, selon Sainte-Beuve, on ne peut comprendre les écrits d'un auteur seulement si l'on connait sa vie. Evidemment, aujourd'hui cette théorie ne tient plus debout : il est inutile de connaitre la biographie de Marc Lévi pour lire ses Best-Seller. Non je déconne, un peu de sérieux. Tout cela pour dire que cette théorie est dépassée, superficielle, et d'ailleurs Proust l'a très vite compris. D'où son essai "Contre Sainte-Beuve".

En effet, selon sa fameuse méthode, le critique avait pour habitude d’apprendre tout de la biographie d’un auteur avant d’écrire une analyse de l’un de ses ouvrages ; ce qu’il questionne alors, c’est la genèse d’une œuvre et du processus créatif. Tout à l’inverse la doctrine proustienne affirme que la sensibilité créatrice n’est pas réductible aux données visibles d’une biographie. Autrement dit : « un livre est le produit d’un autre moi que celui que nous manifestons dans nos habitudes, dans la société, dans nos vices ». Sur le plan littéraire, cela signifie que l’analyse stylistique doit être détachée de toute considération sur la vie de l’écrivain.
En extrapolant soit-on connaître la vie d'un auteur d'un acteur, d'un cinéaste pour apprécier son oeuvre? Juge-ton une oeuvre à l'aune de son créateur,
Plus moderne c'est pas possible : Faut-il voir les chefs d’œuvres de Polanski, de Woody Allen accusés (mais dont les accusations viennent surtout des rumeurs publiques que de la justice), fallait-il gommer les images de Kevin Spacey dans le dernier film de Ridley scott pour des accusations (ici encore non jugés légalement par la loi), faut-il lire les œuvres des anti-sémites notoires comme le voyagea au bout de la nuit de Céline?...Vous êtes pour Proust contre Saint Beuve ou le contraire? A vous de voir mais le choix était déjà là posé dans quelques pages de ce recueil beaucoup trop hétéroclite!

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