Edgar Morin : les souvenirs viennent à ma rencontre


Edgar Morin en dit :

 "Ces souvenirs ne sont pas venus selon un ordre chronologique comme le sont habituellement les Mémoires. Ils sont venus à ma rencontre selon l’inspiration, les circonstances. S’interpellant les uns les autres, certains en ont fait émerger d’autres de l’oubli.
Ils témoignent que j’ai pu admirer inconditionnellement des hommes ou femmes qui furent à la fois mes héros et mes amis.
Ils témoignent des dérives et des dégradations, mais aussi des grandeurs et des noblesses que les violents remous de l’Histoire ont entraînées chez tant de proches.
Ils témoignent des illuminations qui m’ont révélé mes vérités ; de mes émotions, de mes ferveurs, de mes douleurs, de mes bonheurs.
Ils témoignent que je suis devenu tout ce que j’ai rencontré.
Ils témoignent que le fils unique, orphelin de mère que j’étais, a trouvé dans sa vie des frères et des sœurs.
Ils témoignent de mes résistances : sous l’Occupation, puis au cours des guerres d’Algérie, de Yougoslavie, du Moyen-Orient, et contre la montée de deux barbaries, l’une venue du fond des âges, de la haine, du mépris, du fanatisme, l’autre froide, voire glacée, du calcul et du profit, toutes deux désormais sans freins.
Ces souvenirs témoignent enfin d’une extrême diversité de curiosités et d’intérêts, mais aussi d’une obsession essentielle, celle qu’exprimait Kant et qui n’a cessé de m’animer : Que puis-je savoir ? Que puis-je croire ? Que puis-je espérer ? Inséparable de la triple question : qu’est-ce que l’homme, la vie, l’univers ?
Cette interrogation, je me suis donné le droit de la poursuivre toute ma vie."


Un livre de transmission qu'il faut aborder comme un recueil historique où se succèdent, par thèmes, les événements qui ont émaillé le dernier siècle. Des souvenirs, de l'émotion, de la rigueur, de l'authenticité.

Et les rencontres qu'il a faites durant ces 100 ans de vie parfois anecdotiques parfois passionnantes.


"De menus larcins avec des camarades dans les épiceries de Lyon sous l’Occupation, une fête arrosée de vodka à l’occasion d’une victoire militaire soviétique sur les nazis en 1943, la découverte de Hegel grâce à la rencontre fortuite d’un intellectuel hongrois dans un restaurant... C’est ainsi que cheminent les mémoires d’Edgar Morin. Nous sommes loin de l’épopée d’un jeune esprit, né en 1921, qui marche droit devant l’Histoire. La Résistance, l’engagement communiste, la sociologie puis la philosophie : le parcours de l’intellectuel, qui commença par des textes surprenants sur la mort, les yéyés ou la rumeur, pour finir par s’interroger sur le savoir du savoir, se déroule dans un doux vagabondage guidé par les intermittences du souvenir des rencontres. L’initiation philosophique de Jankélévitch au premier étage d’un café toulousain – où Morin rencontrera d’ailleurs sa femme Violette – côtoie, à quelques pages d’intervalle, sa fascination amoureuse pour Marguerite Duras et des moments troublés, comme cette expérience avec une prostituée à Pigalle. Les souvenirs remontent à la surface, les personnes défilent à une vitesse vertigineuse. D’autres reviennent, régulièrement, comme une petite phrase musicale. Par exemple, la comédienne québécoise Johanne Harrelle, qui deviendra aussi sa femme, ou encore le philosophe et psychanalyste Cornelius Castoriadis. Il y a, au fond, un jeu de miroirs entre le Morin philosophe et le Morin des mémoires. D’un côté, sa « pensée complexe » qui refuse de réduire l’être et le monde à des principes explicatifs figés. De l’autre, une vie qui ne se donne pas comme une œuvre définitive animée par une force intérieure et se révèle comme totalement orchestrée par autrui." : philosophie magazine.

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