Jonathan Rabb L’Homme intérieur



Berlin, février 1927. Quand un cadre de la UFA, le plus grand studio européen, est retrouvé mort dans sa baignoire, Nikolaï Hoffner, inspecteur principal de la Kripo, police criminelle, est chargé de l'enquête. Avec l'aide du metteur en scèneFritz Lang et d'Alby Pimm, prince de la pègre berlinoise,Hoffner va vite être entraîné dans de sombres arcanespolitiques. Flanqué de sa nouvelle maîtresse, une beauté américaine qui travaille pour la Metro-Goldwyn-Mayer, Hoffner découvrira dans la douleur qu'un pan de sa vie, et de berlin, est en train de se tourner à jamais.



Biographie Jonathan Rabb


Depuis sa petite enfance, Jonathan Rabb a toujours su qu'il deviendrait universitaire. Fils et petit-fils (des deux côtés) d'historiens, son monde fut chamboulé le jour où il choisit la théorie politique. En tant qu'étudiant à Yale, Rabb passait son temps entre Hobbes, Locke et Hegel tout en s'encanaillant à chanter avec les Whiffenpoofs1 entre deux galops sur la scène du théâtre local où il interprétait des rôles tels que Harry le Cheval et un Don Quichotte très fashion dans L'homme de la Manche. À sa sortie du collège, il gagna New York ou il poussa l'outrecuidance jusqu'à se faire acteur durant quelques années avant d'opter pour un diplôme à Columbia.
Et pourtant, un autre destin l'attendait. Alors qu'il résidait en Allemagne, où il étudiait Samuel Von Pufendorf, un théoricien du XVIIe siècle aussi passionnant qu'obscur (Un Whiffenpoof sur Pufendorf), Rabb eut l'idée d'un thriller où un jeune professeur de Columbia déchiffrant un manuscrit plusieurs fois centenaire rédigé en réponse au Prince de Machiavel se retrouverait embringué dans une grande conspiration. Soudain, le théâtre et l'histoire se mêlaient sous la forme d'une fiction historique et, laissant derrière lui son programme de bourses d'études Fulbright et son université, Rabb passa les deux années qui suivirent à enseigner la préparation aux examens tout en écrivant furieusement.
En 1998, son premier roman, The Overseer, vit le jour, suivi trois ans plus tard par The book of Q — un autre thriller historique — et son mariage avec Andra Reeve, directrice de casting à CBS télévision. Il était temps de se plonger dans le désespoir et la décadence du Berlin de l'entre-deux-guerres. Il commença à travailler sur ce qui devait devenir Rosa, le premier tome de sa trilogie berlinoise, et se mit également à enseigner la fiction à l'auberge de jeunesse de la 92e Rue. En juillet 2004, sa femme donna naissance à des jumeaux et, les deux années qui suivirent, tout en écrivant et se documentant pour Shadow and Light, Rabb devint leur nounou principale. Dieu sait comment, pendant qu'ils croissaient et prospéraient, Shadow and light finit par prendre forme.
Maintenant, Rabb est en plein dans le troisième volume de la trilogie, et trouve encore le temps de jouer du Gilbert & Sullivan avec la troupe de Blue Hill, à New York, l'orchestre symphonique d'Harrisburg et quiconque veut bien supporter son baratin. À l'automne 2010, Rabb commence à enseigner au Programme d'écriture de l'Université de New York et continue de rédiger des chroniques pour l'Opera View et des essais pour la série "I wish I had been there"2.





Voilà un polar historique dont j'ai raffolé pour son atmosphère, son contexte historique particulièrement bien romancé, par l'implantation de l'intrigue dans une de mes villes préférées avec Paris et New York: Berlin, et par la présence en filigrane tout au long de l'histoire, du cinéma. Un cocktail élégamment préparé par un auteur américain qui mérite d'être plus connu en France : Jonathan Rabb.

Alors voici quelques lignes pour vous faire partager ce moment réjouissant de lecture.
"L'homme intérieur" se déroule à la fin des années 1920 à Berlin, moment d'instabilité politico-économique, sous La république de Weimar. Et pourtant artistiquement, la création bouillonne de mille et une propositions notamment à travers le cinéma expressionniste qui vit son âge d'or.

Berlin, ville-mère de toute cette effervescence, s'encanaille follement, assoiffée d'excès en tout genre. Mais alors que l'insouciance la gagne, l'extrême droite tisse ses premières ramifications. C'est dans cet inquiétant et troublant décor que Jonathan Rabb a choisi de planter son intrigue.

Un des cadres de l'UFA, l'un des plus grands studios de cinéma européen est retrouvé assassiné. Est missionné pour résoudre cet enquête, un inspecteur prénommé Nikolai Hoffner. Celui-ci se retrouve confronté à bien plus qu'une simple enquête de routine, car au-delà du crime à résoudre, l'affaire s'avère complexe et sombre. Sa complicité de longue date avec le chef de la pègre berlinoise et l'éclairage judicieux du réalisateur du chef-d'oeuvre Metropolis, Lang, l'aideront à dénouer les ficelles de cet imbroglio complexe.

Mais de l'intrigue finalement, on n'en retient qu'un prétexte et on retient surtout le beau tableau décadent, noir du personnage central de cette histoire: Berlin; aspirée malgré elle par ce gouffre noir qui constitue les prémices du nazisme.
Et pour qui aime Berlin ou qui veut la découvrir, ce voyage dans le temps à travers les quartiers de la ville, reste très contemporain et on ne peut s'empêcher de faire des parallèles avec le Berlin des années 80 à aujourd'hui. Alors que Jonathan Rabb décrit Prenzlauer Berg comme une zone de non-droit, insalubre où son personnage Hoffner est le seul flic à y vivre, on pense à l'émancipation de ce quartier, où vivent aujourd'hui, familles, artistes et bohèmes.

Des personnages, on retient notamment le réalisateur Lang qui devient par la magie de la fiction, un des personnages de l'intrigue.

Et bien sûr, Hoffner, l'inspecteur en charge de l'intrigue, qui a tout du personnage cabossé, torturé, bourru comme on aime en découvrir dans la littérature noire. Son incapacité à aimer et à vivre des relations "normales" avec ses proches: sa défunte épouse, la mystérieuse Leni ou encore ses deux garçons, signent un peu plus ce portrait. Au-delà de la grande Histoire, en parallèle de celle attachée à Berlin, Jonathan Rabb semble alors mettre en scène la course à contre courant d'un homme à bout de souffle.

Plus qu'un polar historique classique, "L'homme intérieur" est une sorte de fresque romanesque sur le Berlin des années 20 vu par un auteur américain. Pour finir, c'est peut-être le titre original qui résume le mieux ce livre: "Shadow and light": Berlin, entre ombre et lumière comme le cinéma de Lang ou comme la double facette de l'âme humaine...

Quoiqu'il en soit, Berlin est dans ce livre, la muse incontestée de Jonathan Rabb.


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