Ken Bruen : la main droite du diable



L'Irlande, noyée sous l'afflux des devises et livrée à la cupidité, ne se tourne plus vers l'Eglise, en quête de réconfort et de consolation.
Mais la décapitation du père Joyce dans un confessionnal de Dublin horrifie les citoyens les plus blasés. Jack Taylor, que le traumatisme lié à la perte d'un être cher vient d'anéantir, s'est toujours considéré comme à mille lieues d'une éventuelle rédemption. Un travail insolite lui offre pourtant un nouveau départ, et une surprenante association lui permet d'entrevoir que l'unique rêve qu'il poursuit encore éperdument, celui d'une famille, peut encore se réaliser.
Quand se mêlent exorcisme inquiétant, prédateur qui rôde et attirance hautement improbable, tout concourt à l'entraîner dans un sombre réseau de conspirations. Le spectre d'une enfant hante chacune des heures qui échappent au sommeil. Désespérée mais lumineuse, l'écriture de Ken Bruen capture le sombre décor de la société irlandaise en cette époque de bouleversements socio-économiques.




Le narrateur est un ex flic irlandais ex alcoolique sortant de l'asile psy et malgré ce passif relativement lourd il a beaucoup d'humour (noir) et nous raconte autant son pays : l'Irlande que son enquête policière qui somme toute n'est qu'un prétexte ou un fil conducteur qui lui permet de nous parler du pays et des gens.
La bière et le whiskey coulent à flot, sauf pour Jack Taylor qui est abstinent bien sur, "l'Irlande a une arme de destruction massive : l'alcoolisme"
L'auteur nous présente le coté le plus noir de l'Irlande et de son mal de vivre mais toujours avec cet humour britanique que j'adore.
C'est le premier livre de Ken Bruen que j'ai lu, sur les conseils de Babelio, et ce ne sera pas le dernier je vous le conseille sans modération.
                                     





Jack Taylor mène des enquêtes mais a la particularité de n'être pas inspecteur, ni commissaire, même plus garda siochana (gardien de la paix) parce qu'il s'est fait viré. Il est reconverti en détective, même pas privé. Bref, un drôle d'énergumène ! Pourtant c'est un grand coeur et un homme sensible (si, si) : responsable de la mort de la fille de son meilleur ami par défaut de surveillance, il a sombré dans une grave dépression qui l'a mené tout droit à l'hôpital psychiatrique où il est resté 5 mois, dans un état de prostration totale. Il doit sa renaissance à un autre patient, un Camerounais, pas aux médicaments.
Jack se retrouve dans les rues de Galway, sa ville (et celle de son créateur, Ken Bruen) pour notre plus grand plaisir, de sucroît en pleine canicule de 2003 (oui, je confirme que la canicule a bien touché l'Irlande en 2003 !)... Il découvre que son meilleur ami est devenu ivrogne et clochard et que l'ex-femme de celui-ci, n'a qu'une envie trouer la peau de Jack à la première occasion. Pourtant, ce n'est pas ce qui va occuper notre héros, mais le meurtre d'un prêtre...
Ken Bruen aborde ici sans concession ni "édulcorant" les scandales de la pédophilie en Irlande. Il n'hésite pas à faire parler les victimes et c'est l'occasion pour Jack Taylor de régler ses comptes avec un prêtre qui traînait un peu trop avec sa mère : les hommes d'église aimaient bien les femmes seules avec enfant. Ken Bruen n'hésite pas à secouer le lecteur par une écriture qui ne fait pas dans la dentelle et un humour noir corrosif qui fait mouche !
Jack Taylor traîne ses guettres dans les rues de la Galway du Tigre celtique et rien ne lui échappe. Il a le sens de la répartie, surtout en ce qui concerne son pays :
"L'Irlande est un pays de questions et de très très rares réponses"
"Conseiller aux gens, en Irlande, de fare attention au soleil, c'est aussi rare que de servir du bacon sans chou pour l'accompagner"
"Jamais vous ne verrez, et je dis bien jamais, un citoyen irlandais passer sour une échelle ou ne pas croiser les doigts pendant un match de hurling"
"Neuf fois sur dix les femmes d'Irlande ne manquent pas de vous casser les couilles" : ah bon ? je crois que l'inverse est tout à fait vrai !!
L'autre événement majeur de cette aventure c'est que Jack a renoncé à tout jamais à l'alcool. Et il tient parole : il va au pub avec les diverses personnes qu'il rencontre mais, s'il commande un bière, il la laisse intacte ! Au pire, il essaie une cuite au café noir...
Le personnage de Jack Taylor m'a un peu fait penser à John Rebus, le héros de Ian Rankin... Comme son confrère écossais, Ken Bruen sait vous plonger dans l'ambiance d'une ville avec un personnage tout sauf parfait...
Autre détail d'importance : Jack Taylor est un amoureux des livres, surtout des romans noirs des années 50. Rien de tel qu'un petit David Goodis pour remettre notre héros sur pied : "Je voulais seulement avoir du temps pour me reposer, essayer de récupérer un peu d'énergie. Je me plongeai intensément dans la lecture. David Goodis, bien sûr. Dans le lot que m'avait préparé Vinny, il y avait Eugène Izzi, Invasions, coincé entre CAUCHEMAR etCassidy's girl. Si un écrivain de romans noirs a un jour connu une fin noire, c'est bien lui."
Bref, un Ken Bruen de très très bon cru, qui rend accroc ! Ce roman noir a d'ailleur obtenu le Grand Prix de littérature policière 2009.
On en redemande



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