"Vernor Vinge" : "Rainbows End". 2006. Prix Hugo 2007.

Roman de S.F qui a obtenu le prix Hugo du meilleur roman en 2007 ainsi que le prix Locus du meilleur roman de science-fiction la même année. Les nombreuses avancées technologiques décrites dans le roman suggèrent que le monde subit de plus en plus de changements, et que le monde est peut-être destiné à une singularité technologique, un sujet récurrent chez "Vinge" (dans ses écrits de fiction et de non-fiction). Le héros principal du roman est "Robert Gu", un homme se remettant lentement de la maladie d'Alzheimer grâce aux progrès des technologies médicales. Avec le retour de ses facultés, Robert (qui a toujours été légèrement technophobe) doit s'adapter à un monde très différent, où presque chaque objet est mis en réseau et où la technologie de réalité augmentée est monnaie courante. Robert, autrefois un poète de renommée mondiale, à la personnalité notoirement mesquine, doit réapprendre à la fois l'usage du monde en retournant au lycée, mais aussi la base des relations humaines afin de rétablir une relation avec la famille de son fils qu'il a toujours tyrannisé avant sa maladie. Parallèlement, Robert et sa petite-fille Miri sont entrainés dans une intrigue complexe impliquant l'agence de renseignement indo-européenne, une intelligence redoutable (et peut-être surhumaine) cachée derrière un avatar de lapin anthropomorphe, ainsi que de nouvelles technologies visant au contrôle mental des foules. Vinge nous décrit un avenir caractérisé par l'utilisation quotidienne et intensive de la réalité augmentée, et se lançant dans une course en descente contre les menaces terroristes provoquées par l'accessibilité croissante des moyens de destruction massive (l'ombre du 9/ 11 plane sur une escalade des attaques et des contre-mesures de sécurité, au point qu'on y affirme avec satisfaction qu'au moment d'initier l'action, plusieurs années se sont écoulées depuis la dernière attaque nucléaire sur le sol des Etats-Unis. Le futur proche (2025) qu'il nous décrit est un monde de contrastes, où les merveilles d'une technologie informatique presque magique (bien que solidement soutenue par une utilisation éclairée des protocoles d'échange de données et de sécurité) sont contrebalancées par les menaces latentes que le même développement scientifique a rendu possible. De même, le thème de la singularité s’insinue dans une société qui subit un processus de changement continuellement accéléré, dont la fin peut être à la fois catastrophique et tout simplement incompréhensible pour les membres les plus âgés de la société. Vinge profite de l'intrigue pour exprimer ses idées sur l'informatique et le développement social, avec par exemple des vêtements qui ont remplacé les ordinateurs personnels (au point qu'interagir avec la réalité augmentée s'appelle « s'habiller »), manipulés intuitivement par les jeunes et presque impossibles à comprendre et à manipuler pour les personnes plus âgées et des cercles d'opinion virtuels entre les adeptes d'un imitateur de "Terry Pratchett" et les fans d'une sorte de monde fictif de type Pokémon, qui s'affrontent dans des batailles semi-virtuelles spectaculaires (la bataille du destructeur des bibliothèques au cœur de ce conflit), ainsi que des services de renseignement prêts à agir avec toute la force nécessaire en quelques minutes contre toute menace imaginable (pour les plus inconcevables, cela prend un peu plus de temps). Entre hommages littéraires (de Goethe à Lewis Carroll) et quelques attaques contre le cyberpunk (dont la véritable base informatique, malgré son influence ultérieure, était presque nulle), ce "Rainbows end" pourrait bien être vu comme une sorte de remake de "Neuromancer ", troquant les antihéros en marge de la société de "Gibson" contre des seniors un peu maladroits et des préadolescents technophiles. Voici donc un roman qui a de la valeur non seulement par sa qualité littéraire, évidente et son l'histoire, intéressante mais aussi par l’environnement technologique dans lequel évoluent les personnages. Avec ses sociétés secrètes et ses agences gouvernementales comme toile de fond narrative, le roman sert de base à toute une démonstration des capacités technologiques qui nous permettent de découvrir l'évolution de l'usage social de la technologie et son utilisation dans la vie quotidienne au cours des prochaines décennies. Un exemple d’anticipation technologique. C'est de la science-fiction à son meilleur, pleine d'idées innovantes expliquées par leur utilisation quotidienne ; C'est dans la normalité et la vie quotidienne que ses possibilités, ses qualités et ses défauts sont observés sans avoir besoin d'explications, simplement en lisant le roman, le lecteur acquiert cette connaissance naturellement et sans s'en rendre compte. On y voit les limites technologiques actuelles et les possibilités d'un monde où la technologie est tellement liée à la vie quotidienne que réalité et non-réalité se confondent. "Vernor Vinge" le fait sans prendre parti clairement, bien sûr, sans sermons ni critiques, il ne nous dit même pas que c'est quelque chose d'évitable, ni bon ni mauvais... c'est juste ce qu'il y a, ce qui va arriver selon lui. Ainsi se combinent une intrigue de vieux bibliothécaires qui veulent préserver les livres de la numérisation d'une entreprise, une agence d'espionnage indo-européenne qui ne figure même pas dans l'organigramme des services de renseignement, un groupe d'étudiants curieux et un espion , Rabbit, qui, grâce à ses contacts et ses ressources surprenantes, met en échec les bons comme les méchants de l'intrigue. "Rainbows end" est un livre à lire si vous aimez la science-fiction, ou simplement la science, ou les jeux de rôle, ou si vous rêvez simplement du futur. C'est amusant et on voit les personnages changer et évoluer, ce qui dans ce genre est toujours appréciable D'autant plus que la théorie de "Vinge" selon laquelle le futur se rapproche chaque jour plus rapidement du présent semble de plus en plus se réaliser.

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