Margaret Mazzantini : Splendeur

Fils unique d'une famille meurtrie par la dépression et l'alcoolisme, Guido grandit dans l'ignorance de ces maux, porté par un amour absolu pour une mère absente. Il erre dans son appartement, son immeuble, où la famille du gardien, vibrante de vie, prend beaucoup de place. Le fils surtout, Costantino, qu'il côtoie depuis toujours, dans la cour de l'immeuble comme à l'école, sans jamais oser en faire son ami. Pudeur, timidité rongent les deux enfants jusqu'à l'adolescence quand, un soir, pendant un séjour en Grèce, ils découvrent leur sexualité. La peur de se livrer, de s'assumer, de s'aimer conduit l'un et l'autre vers deux chemins différents. Guido poursuit ses études à Londres, où il découvre une nouvelle culture underground et s'enivre dans une errance urbaine entre drogue, sexe hétéro et abstinence homo... jusqu'à ses retrouvailles avec Costantino. Pourront-ils enfin goûter la splendeur aperçue quelques fois, toujours espérée ? Dans un style à la fois lyrique et incisif, Margaret Mazzantini décortique une passion amoureuse et livre une réflexion subtile sur l'homosexualité. Guido (le narrateur qui au début surtout m'a inspiré pas mal d'aversion) et Costantino, deux jeunes du même âge, appartenant à deux classes sociales différentes, qui partagent l'enfance et l'adolescence et fréquentent le même lycée. Une attirance naît entre eux "Puis soudain la tendresse, le changement de caractère, de sentiments, de mots, de mouvements, de sons, d'odeurs."
qui se transformera en amour au fil du temps. Tous deux vivront cette expérience physique avec un sentiment de culpabilité qui les fera se sentir en marge de la société dont ils font partie. Et voici le véritable drame : ce sont Guido et Costantino eux-mêmes qui se considèrent comme des transgresseurs de ce code qui conditionne leurs principes moraux. L'homosexualité est vécue comme un péché et doit donc rester cachée. D'où la nécessité de créer une existence de façade respectable et estimée, de consommer dans l'ombre une relation clandestine ressentie comme un outrage au monde environnant. La vraie question ne semble donc pas porter sur ce qu'il faut considérer oui ou non contre nature, mais plutôt sur comment faire accepter sa diversité lorsqu'on ressent d'abord le besoin de la cacher et de la nier. Il y a ceux qui revendiquent la dignité de l'homosexualité, ceux qui l'étouffent et la rejettent : le drame du rapport à la société peut aussi être vécu uniquement de manière interne, au-delà des agressions et des violences externes. Dans son histoire à la première personne, Guido décrit l'évolution de ses sentiments pour Costantino et entre les lignes, il laisse transparaître son sentiment de culpabilité, à chaque instant, au point de préciser que dans cette relation, c'est la transgression qui alimente le sexe et pas l'amour. Le caractère problématique des ressentis de deux personnages semble symboliquement accentué par la stérilité de Guido et la paternité malheureuse de Costantino. Leur vie ne semble donc pas destinée à se perpétuer dans le temps, presque dans une sorte de condamnation (malédiction) tacite. Les années d'adolescence et de jeunesse des deux garçons se passent à Rome, ce sont les années d'études et de culture classique, de voyages scolaires en Grèce, tandis que Londres sans scrupules et multiethnique accueille Guido adulte et en route vers un parcours universitaire : la rencontre avec "Izumi" qu'il épouse et qui lui donne des enfants va apporter un certain soulagement à son agitation constante. La violence du monde extérieur explose cependant pendant le voyage en Italie, lorsque surpris la nuit en plein rapport sexuel dans un endroit isolé au bord de la mer entre la Calabre et les Pouilles, les deux amants sont férocement attaqués.L'autrice semble vouloir souligner les préjugés d'un pays ancré dans de vieux principes. En réalité, les seuls moments heureux de la vie de ces personnages sont ceux passés au sein de familles traditionnellement constituées. La "splendeur" entrevue parfois par Guido et Costantino, qui coïncide toujours avec une vision apaisante soit d'un champ de blé doré, soit d'un panorama, n'est donc rien d'autre qu'une brève lueur qui s'éteint soudainement comme un rêve. qui semble les changer, les effrayer, les repousser.C'est un vide continu de tout ce qui leur appartenait où tout est écrasé par la peur, le ressentiment et l'égoïsme. s'éteint soudainement comme un rêve. Nous ne sommes pas ici face à un roman qui décrit la problématique du rapport entre diversité et société, du seul point de vue de la société, mais face à une problématique bien plus large qui concerne la sphère intime de la diversité elle-même : le roman semble vouloir montrer qu’il y a encore un long chemin à parcourir pour que ceux qui sont différents acceptent leur condition avec dignité et sans honte. Le même concept de diversité, qu’il soit appliqué à la sphère sexuelle, sociale, ethnique ou physique, doit être courageusement aboli même si atteindre cet objectif nécessite parfois un chemin difficile et douloureux et pas toujours couronné de succès.
"Avoir du courage, c'est savoir qu'on est vaincu avant même de commencer, et commencer quand même et arriver au bout , quoi qu'il arrive. Ne tirez pas sur l'oiseau moqueur de Harper Lee"
La conclusion du roman réserve un petit twist, qui ne change cependant pas beaucoup la structure globale de l'ouvrage. Les dernières pages sont touchantes Le temps est marqué par les événements historiques et politiques auxquels on fait référence sans l'aide de dates, ce qui évite certes une ennuyeuse succession de chiffres, mais nécessite en revanche un effort supplémentaire de la part du lecteur pour identifier la période exacte où se déroule l'événement. Tout cela donne ebn définitive un roman assez cruel et qui ne laisse à cete fameuse "splendeur" qu'une portion congrue : un instant, un moment suspendu dans le temps qui sera toujours présent mais uniquement dans le souvenir. Tout cela m'aurait paru plus convainquant s'il s'agissait d'un roman des années 70 car on est bel et bien en plein dans
"l'homosexualité ce douloureux problème"
. Pour les protagonistes, l'amour est ressenti presque comme une maladie, alternant l'extase et le vide, une recherche jamais satisfaite, des questions sans réponse, une nostalgie poignante, un lien aussi indissoluble que douloureux; les gays de Mazzantini sont tourmentés et déstinés à un supplice insensé.Tout ça pour un amour qui semble en définitive presque imaginaire et qui 'aboutit jamais. Après c'est peutête encore le cas en Italie ça je ne sais pas. On fini le roman avec une impresion peuagréable, triste, dans ce finalplein de regrets et de remords en espérant qu'il n'aitplus trop d'histoirescomme ça... Splendeur. Cela pourrait être un éclat splendide. Ou une prison terrible quand elle reste enfermée en nous et que nous n'avons pas le courage de la libérer et de la vivre...
"Demander est la honte d'une minute, ne pas demander est la honte de toute une vie."
La lecture n'est pas aisée Mazzantini ne fait pas forcemment dans le clair ou le transparent et semble presque insouciante de la compréhension de son écriture mais bon c'est un choix de ournure poétique. Transformer la honte en splendeur, je crois que c'était le message principal que voulait livrer l'autrice mais pour moi en faisant sombrer son histoire dans la douleur l'échec elle n'y arrive pas.

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