Noicolas Reading : La salope. 2024.

Je vous livre aujourd'hui le post que j'ai écrit suite à mon entretien avec "Nicolas Reading" à propos de son livre "la salope". 2024. Le roman a été sélectionné pour le prix du roman gay 2024. Jusqu’à à aujourd’hui Nicolas Reading a publié : En 2005, le roman, « Le cri du corbeau »… Un roman sombre, parfois désespéré, qui relate les jeunes années de Roméo, un enfant évoluant dans un univers aisé qui se retrouve malgré tout confronté à des situations émotionnelles éprouvantes. En parallèle, à Deauville, un des lieux principaux de l'action, on parle de disparitions d'enfants et d'adolescents. On suspecte un pédophile d'en être l'auteur. Les deux histoires se rejoignent quand Roméo devient la proie du soi-disant criminel. En 2010, le recueil de nouvelles » Les Noires Anecdotes (the Book Edition) » : des nouvelles macabres qui abordent le thème de la mort. Et où chaque chapitre est agrémenté de photographies du Père Lachaise qu’il a lui-même prises pour instaurer une atmosphère délicieusement morbide. En 2010, deux recueils « HAÏKU et SENRYU VOLUME 1 et 2, (the bookEdition), une forme poétique qu’il affectionne particulièrement, En 2024, les deux premiers volumes d’une trilogie de « Dark Fantasy » Jeunesse : « Egoyan Harlow » puis « le vampire de Tihuac » (édition allâda). Côté théâtre, on lui doit, l’écriture et mise en scène de « Ça swingue et Ça pouponne chez les Raid’Dingue » inspiré de la famille Adams… que l’on peut voir sur sa chaîne You Tube ; La mise en scène de la pièce « Eva, Evita », un drame historique sur le destin hors du commun d’Eva Perón, pièce qui a rencontré un vif succès public et critique à Paris ; L’écriture et mise en scène de « Baby Jane », une adaptation du cultissime film d’Aldrich « Qu’est-il arrivé à Baby Jane » avec Bette Davis et Joan Crawford. De plus Nicolas Reading a présenté à la rentrée de Septembre 2024 au théâtre Du Nord-Ouest, deux nouvelles pièces : «Vieilles peaux», une comédie dramatique sur la thématique de l’Alzheimer, entre rire et larmes, et le « cabinet de curiosité » sur les addictions en Septembre. Et nous en arrivons au roman au titre un brin provocateur « La salope ». 2024. Paris, Arthur, la vingtaine, qui est monté à Paris pour ses études, multiplie les plans cul. Il se définit lui-même comme une « salope » qui baise à tout va. Dans le premier mouvement du texte (Chapitre un à cinq), en effet, nous suivons le parcours d’Arthur dans ses plans cul au fil des chapitres… Arthur teste les blacks, les rebeus, l’homme marié quarantenaire, le jeune cadre dynamique, l’inconnu masqué de latex, le boucher Allal… , des trios, des soirées à thème… L’auteur nous offre ici une analyse extrêmement fine et pertinente de la façon dont Arthur utilise la sexualité effrénée Cependant, au fil des pages, les failles d’Arthur se dévoilent et l’on comprend que sous cette attitude de « Salope », il y a un cœur meurtri qui saigne suite à un premier grand amour qui s’est fini en rupture brutale. Car Arthur avant cette première rupture amoureuse croyait avoir trouvé son prince charmant p11. Il ne veut plus revivre ça et il a choisi d’utiliser les meilleures armes dont il dispose, son corps et son cul, pour blinder son cœur contre la souffrance amoureuse. Si Arthur est une salope c’est donc parce qu’il veut se forger une carapace avec son cul, et qu’il cherche à utiliser sa carapace qu’il essaye d’épaissir en ne fixant plus de limite à sa sexualité, en se comportant exactement comme un prostitué, sauf qu’il ne veut pas se faire payer (p37 : je ne le fis pas pour l’argent ! mais par curiosité, combien ça rapporte ?) d’où le titre « La salope » ; lors de notre entretien Nicolas Reading me précise assez vire que « Salope » est un mot très en vogue dans le milieu gay Parisien, féminisation insultante (et pas très cool en ces temps post MeToo), qui n’a pas grand-chose à voir avec « pute », mot réservé aux travailleurs-ses du sexe beaucoup moins dénigrant. En toute logique, cette partie du texte est crue et explicite. Cependant, on sent assez vite qu’Arthur n’est pas aussi froid, aussi imperméable aux rencontres qu’il fait, aussi détaché des sentiments qu’il veut bien se le faire croire… Par exemple, à l’un de ses plans, jeune et beau trentenaire, cadre dynamique, il fait cette remarque : « J’ai l’impression que tu te caches derrière ton boulot pour ne pas t’ouvrir aux autres » ce qui laisse deviner sa capacité à l’analyse psychologique. Plus tard, alors qu’il joue au troisième avec un couple, Arthur joue les médiateurs pour les « réconcilier dans l’intimité ». Il montre aussi sa gentillesse lors de la rencontre, qui le marque, avec une clocharde. Dans son deuxième mouvement, aux chapitres six et sept le roman change de ton et Arthur évolue : Notre héros se retrouve avec l’obligation de travailler dans un hôpital ou il y fait d’une part, une rencontre décisive avec une secrétaire médicale avec laquelle il va nouer une relation forte, puis, d’autre part, affecté en réanimation il va être confronté à la souffrance extrême : Chaires éclatées, mort, deuil de ceux qui restent, SIDA … Toute cette souffrance psychique et psychologique fait évoluer la perception qu’il a de sa propre vie, de ses propres douleurs. C’est un passage du corps comme objet sexuel et de plaisir charnel au corps éclaté, déchiré et mortel de l’hôpital, de la souffrance. Puis il reçoit une lettre du garçon qu’il aimait et qui l’a abandonné. Avec des explications inattendues. La carapace de glace dont il a entouré son cœur peut-elle résister ? Enfin dans un troisième mouvement (Les trois derniers chapitres), Nicolas Reading nous montre un Arthur que les évènements qu’il vient de vivre ont profondément fait évoluer. Arthur quitte Paris pour récupérer, pour recommencer…grâce à la mer. Puis recherchant les couleurs du sud-est, il achète une toile chez un brocanteur. Ce changement de couleur qu’il recherche accompagne avec intelligence un nouveau changement de ton (de nuances) du roman. C’est peu dire que je ne m’y attendais pas et que j’ai trouvé cette dernière partie du texte aussi étonnante que réussie. Mais je ne peux pas en dire grand-chose puisque ce serait vous enlever la surprise… Disons que de nouvelles péripéties vont amener Arthur à rencontrer un vieil brocanteur, énigmatique et d’une grande mais mystérieuse sagesse qui va lui ouvrir de nouvelles portes… Le roman aura évolué tel concerto en trois mouvements, d’un réalisme cru, en passant par la tragédie à une sorte de fantastique peut être onirique, dans lequel on peut voir une variation intéressante du portrait de Dorian Grey d’Oscar Wilde. Étant entendu que le fantastique est pour Nicolas Reading est une façon de parler du réel sur le mode de l’irréel, ce qui ici fonctionne parfaitement. Quant à la fin du roman je peux seulement vous dire qu’il apporte son lot de surprises… Enfin je voudrai insister sur la qualité du style de l’écriture de Nicolas Reading : Tout d’abord dans l’invention des comparaisons et métaphores particulièrement savoureuses, crues, inventives et souvent drôles de la première partie : « auto-attentat par terrorisme stomachal ; le cul…terre d’accueil ou en happy hour, la visite métacarpienne…). Et puis dans l’utilisation de « l’amplification « (parfois hyperbolique) d’adjectifs ce qui donne quelques sommets poétiques : par exemple lorsque la parole est « improvisée, didactique, enivrante, truculente, abusive, d’or ou de chimères, donnée ou reprise … Ou encore lorsque « le cri » est « de cœur, de souffrance, de Munch ou d’Antonioni, de fiel ou d’amour, coïtal, carnavalesque…) « La salope » est une Novella tour à tour trash, romantique, dramatique ou poétique qui, comme tout bon roman d’apprentissage nous aura ainsi fait progresser par étapes de l’ombre à la lumière, de la consommation sexuelle effrénée à une sorte de sagesse durement gagné, le tout avec un style riche et plein de panache. À coup sûr un roman qu’on prendra plaisir à relire et à offrir. #hernrimesquida #cinemaetlitteraturegay

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