Film. "La chatte à deux têtes" est une comédie dramatique de « Jacques Nolot ». 2002.

Un cinéma porno du côté de la place Clichy. Dans la salle sont disséminés des hommes. Ils regardent l'écran, et surtout ils s'observent les uns les autres, guettant la possibilité d'un contact. Des travestis arrivent au cinéma et monnayent leurs services auprès des spectateurs. À l'extérieur, la caissière raconte sa vie mouvementée au projectionniste, un jeune provincial un peu naïf amoureux d'elle. Un quinquagénaire arrive au cinéma… « Jacques Nolot » poursuivait un sillon autobiographique et hyper intimiste, amorcé avec L’Arrière –pays, en poussant peut-être un peu plus loin la mise en danger inhérente à la représentation de soi puisqu’il abordait la question sexuelle, domaine intime par excellence et aussi domaine central de l’existence, où s’accomplit la vérité d’un être. Le culot du réalisateur, « J. Nolot », de par ce qu’il montre (le sexe furtif masculin dans une salle de cinéma porno est explicite), mérite respect. D’un point de vue purement cinématographique, l’originalité du dispositif est intéressante. Filmer le public d’un cinéma pendant une projection, sur la durée d’un film, est une forme de mise en abîme que je n’avais encore jamais vu. L’aspect autobiographique (même romancé), le témoignage sur la hantise du Sida, la famille, le temps qui passe… est émouvant. « Nolot » parvient à garder une forme de pudeur malgré tout et à éviter le pathos. Sur fond de pornographie hétérosexuelle, un lieu de drague homosexuelle avec ballet de travestis. Une communauté, quasi un monde clos (c’est très ritualisé, organisé, avec codes et parades). Ce n’est pas un film qui "romantise" la pornographie ni en dénonce la dépravation : Il n’y a pas ici et c’est tant mieux, de jugement moral C'est pourtant grâce à la vision de ces scènes d'abandon de soi, de masochisme, de sexe 'hard', que l'on apprécie les discussions graves de la caissière avec ses habitués favoris, que l'on s'attache ou s'apitoie sur certains personnages, et que l'on comprend un peu de leur solitude, de leur détresse, et de leur différence. Le réalisateur maîtrise parfaitement cette errance au sein d'une antre aux couleurs noire et rouge, lieu de perdition, ou plutôt endroit où se dévoilent les êtres, et dont on se retire vers une lumière plus saine. En tout cas, avec cette chatte à deux têtes, « Nolot » confirme une conception du cinéma comme mise en danger de soi, mise à l’épreuve. Seul bémol, pour moi, l’histoire de séduction à trois (avec la caissière et le jeune projectionniste) n’est pas très crédible. Un film attachant, qu‘on peut rattacher à l‘ensemble du cinéma d‘auteur inspiré par le porno (« Vecchiali », « Breillat », » Bonello »…). Je préfère néanmoins la sexualité radieuse du "Shortbus" de « John Cameron Mitchell ». #henrimesquida #cinemaetlitteraturegay

Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

Film : « De noche los gatos son pardos » film suisse OFNI de « Valentin Mertz ». 2022.

Film : « Stranizza d'amuri » de « Giuseppe Fiorello ». 2023.

Lonsam Studio photo gay japon